Ma cerise sur ton gateau

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 Entretien avec Lionel Labosse pour le site Altersexualité à l’occasion de la sortie de Dans la peau d’un jeune homo. Mes réponses ont été complétées et réactualisées en août 2011 (entre parenthèses).

- Combien de livres avez-vous publié ?

Dans la peau d'un jeune homo est mon quatrième livre. Toutes les quatre abordent le thème de l'homosexualité. (L’été 79 est mon sixième livre. Et le premier à aborder un thème différent. Un cycle a été clos avec Bienvenue dans le Marais).

- À quelle classe d’âge vos livres s’adressent-ils ? S’adressent-ils plutôt aux écoliers, collégiens, lycéens ?

Dans la peau d’une jeune homo a été écrit à l’adresse des ados à partir de 14 ans, l'âge de mon personnage. Mais il peut être intéresser et faire rire tous les anciens ados. Mes précédents livres s'adressent à un public adulte. (Les suivants également)

- Accepteriez-vous qu'on qualifie votre livre de B.D. « gaie » ? ou B.D. « LGBT » ?

Non. J'ai conçu ce livre de façon à ce qu'il puisse être lu par tout le monde, pas seulement par les gays mais aussi par leurs parents et leurs amis. Je l'ai fait pour essayer de rendre l'homosexualité plus compréhensible à chacun. Je revendique pour ce livre-là une fonction éducative, utile, même si cela n'a rien d'un manuel scolaire, c'est beaucoup plus drôle.
Je n'aime pas le terme de BD gaie parce qu’il est réducteur. Je n’ai conçu aucun de mes livres en pensant qu’il était destiné à un public spécifiquement gay, même si à l’arrivée, certains n’ont été lus que par la communauté. Mon ambition est de toucher le plus large public possible.

- S'agissant particulièrement du domaine de la Bande dessinée, pensez-vous qu'il y ait eu dans le passé des réticences et de la censure par rapport aux thèmes alter/homosexuels ? Pourquoi ?

Je m’exprime naturellement par le biais de la bande dessinée. Cela surprend encore car nous sommes très peu d’auteurs homos à aborder le sujet de front par ce moyen d’expression. Ralf konig, Fabrice Neaud et quelques rares autres auteurs ont contribué à « déblayer le terrain ». Sans eux, je n’aurais peut-être pas osé le faire. Je pense qu’il est plus facile d’aborder ce genre de thème aujourd’hui qu’il y a quinze ans, notamment grâce à la nouvelle vague de la bande dessinée et des auteurs issus des labels dits indépendants tels que l’Association ou Ego Comme X qui ont présenté au public une bande dessinée adulte, avec des formats et des tons différents. Il a fallu plus de temps pour la bande dessinée que pour la littérature pour s'affranchir. Il faut dire que la bande dessinée est lue surtout par les hommes hétéros. D’ailleurs, il y a à peine 15 ans, les auteurs femmes se comptaient sur les doigts d'une main, aujourd'hui, il y en a beaucoup plus.

- Votre position d'auteur est-elle militante ? Vous inscrivez-vous dans la perspective de faire évoluer les mentalités, de banaliser homosexualité ? Préférez-vous raconter des histoires qui vous touchent et toucheront vos lecteurs ?

Ma première vocation est de raconter des histoires et d'expérimenter des nouvelles manières de raconter. Mais mes livres parlant de l’homosexualité, on fait de moi un militant. La presse a parlé de mon précédent livre, le petit Lulu, comme d'un acte militant, parfois même en le réduisant à ça, ça m'a surpris, je ne l'avais pas conçu comme tel. Mais si mes livres contribuent à banaliser l'homosexualité, tant mieux.

- Pensez-vous que l'on puisse aborder tous les thèmes en littérature jeunesse ? Qu'est-ce qui est selon vous tabou ?

Je pense que l'on peut aborder tous les thèmes. Tout dépend de la manière. Il ne faut être ni trop brutal ni mièvre.

- Si l’on parle d’amour doit-on aussi parler de sexualité et de passage à l'acte sexuel selon l'âge auquel on s'adresse ? Vous imposez-vous des limites ? Lesquelles ?

Cette question est particulièrement d'actualité pour moi car j'aimerais faire une suite à Dans la peau d'un jeune homo qui abordera la question de la prévention contre le sida. Il va donc falloir aborder la sexualité de front. J'avoue que je ne sais pas jusqu'où je pourrai aller. Mais la question la plus importante pour moi, c'est quelle histoire raconter pour dédramatiser, "désangoisser" la question du préservatif. (Cette suite est sortie, il s’agit de Bienvenue dans le Marais).

- Vous inspirez-vous d'autres auteurs ou de grandes figures du panthéon homosexuel ?

Les livres d'Hervé Guibert m'ont beaucoup impressionné. Proust me passionne. J’ai découvert Gide il y a assez peu de temps, j’aime ses romans mais surtout son journal. Mais je ne crois pas m’en inspirer de ces auteurs, en tout cas pas directement. Mais un auteur homo de bandes dessinées m’a beaucoup influencé : Copi, qui publiait des planches dans le Gay Pied, entre autres. Injustement, ses bandes ne sont quasiment plus rééditées alors que ses pièces de théâtre sont constamment reprises. Dommage !

- Quelles sont vos références en littérature générale, en littérature jeunesse, ou dans votre domaine artistique ?

En bande dessinée, j'aime la ligne claire, c'est-à-dire un style très clair et précis aussi bien au niveau du dessin que celui de la narration. Hergé, bien sûr, Bretecher, Régis Franc, Emmanuel Guibert, Ludovic Debeurme, Loustal, Riad Sattouf. La nouvelle génération d'auteurs américains est enthousiasmante : Adrian Tomine, Alex Robinson, Daniel Clowes et surtout Chris Ware, ils nous parlent d'aujourd'hui d'une manière très intelligente et sensible. J’aime aussi certains canadiens, comme Seth ou Joe Matt. J’admire aussi le travail de Fabrice Neaud.

- Quelles difficultés particulières avez-vous rencontrées dans l'écriture de vos livres ? Comment ont-il été accueillis par les éditeurs, auprès de la presse (générale, spécialisée jeunesse, gaie et lesbienne), auprès du milieu scolaire ?

Les éditeurs ont répondu très favorablement à mes différents projets concernant l'homosexualité. La presse gaie ou pas a plutôt bien accueilli mes livres.

- Comment vos lecteurs ont-ils accueilli ce livre en particulier ? Lors de rencontres avec vos jeunes lecteurs, quelles sont leurs réactions relativement à ce livre, notamment par rapport à la thématique alter/homosexuelle ?

Des parents m'ont dit que le livre leur avait fait réfléchir sur leur relations avec leurs enfants ados ou pré ados, un jeune homme hétéro m'a dit que cela l'avait questionné sur sa propre sexualité... je n'ai pas encore eu de réactions d'ados. Je pense qu'ils n'oseront pas facilement parler de sexualité à un adulte.

- Quels sont vos projets ?

(Je suis sur le second tome de L’été 79.  Et j'ai en tête un roman graphique en plusieurs volumes qui racontera l’histoire d’une famille sur de nombreuses années. J’ai hâte d’y travailler.   Mais j’ai aussi plein d’autres projets dont il est encore un peu tôt pour parler.)



 

illustration Tétu



 

 entretien avec Rouge

 

 



 


 


 


 



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